SMAST-CGT

Syndicat des ministères des affaires sociales et du travail

La retraite – financement des retraites – les propositions de la CGT

Contexte
  • Nos propositions pour les retraites s’inscrivent dans le projet social que nous portons
  • L’enjeu des retraites n’est pas déconnecté de la sécurité sociale dans son ensemble, attaquée de toutes parts par le gouvernement
  • La question des retraites ne peut se penser sans lien avec la création et la répartition des richesses, c’est à dire les ressources du système
  • Urgence sociale et urgence climatique doivent nous conduire à changer de modèle économique
  • Ce nouveau modèle doit intégrer une baisse du temps de travail, dont l’âge de départ en retraite est une modalité.
Introduction

La finalité du projet gouvernemental est claire :

Refus d’augmenter les recettes du système pour l’équilibrer
Limiter encore davantage les dépenses pour financer les baisses d’impôts pour les entreprises

Ce projet implique bien la diminution des pensions et le recul de l’âge de départ à la retraite.
En s’attaquant au système socialisé, le gouvernement pousse celles et ceux qui le peuvent à la capitalisation.
Nous proposons un autre projet, financé, crédible, assis sur la cotisation sociale

Retraites: un déficit construit de toutes pièces

Le chiffre de 13 5 milliards à horizon 2030 (ou même 12 milliards en 2027 retenu par le gouvernement est largement discutable du fait des hypothèses du Conseil d’orientation des retraites – COR. Le COR fait par exemple l’hypothèse que la part des salaires (et des profits!) dans la valeur ajoutée n’augmentera pas, or c’est un enjeu crucial de financement de la Sécurité sociale.
Il y a également l’hypothèse d’une baisse de la part de l’emploi public Pour la fonction publique hospitalière, seulement 15 000 recrutements sont prévus, alors qu’au moins 400 000 emplois sont nécessaires rien que pour la santé

Même en prenant le scénario retenu par le gouvernement, il n’y a pas de problème budgétaire à court terme.

En aucun cas le système n’est en danger

12 milliards de « déficit » en 2027 c’est 3% des dépenses du système de retraite en 2022 (370 milliards€).
Une hausse de 0,8 point de cotisation suffirait à combler ce déficit. Soit 8,25 € par mois pour de cotisations salariales et 8,25 € de cotisations patronales (si
partage à 50 50 pour un SMIC CGT à 2000 €.

Le système de retraites dans son ensemble dispose de 200 milliards de réserves.

Le COR lui même reconnait que le déficit est temporaire avec un retour à terme à l’équilibre.

Le vrai problème, c’est le niveau des pensions à venir

Le système actuel n’est pas en déficit du fait des différentes réformes passées (mesures d’âge et désindexation des pensions sur les salaires). Comme le gouvernement n’a jamais voulu augmenter les recettes, l’ajustement s’est fait sur les dépenses. Sans changement, une forte dégradation du niveau de pensions des retraités est donc prévue. Une augmentation des recettes est nécessaire pour financer de nouveaux droits et éviter cette dégradation des pensions.
Par rapport à la situation actuelle, nos propositions impliquent un coût qui se chiffre à environ 100 milliards d’euros, qu’il faut prendre au capital !

Améliorer le système de retraites: ce que nous proposons

Départ en retraite à 60 ans pour toutes et tous (hors départs anticipés pour les métiers pénibles).
Revenir au calcul sur les 10 meilleures années pour le privé.
Conserver le calcul sur les 6 derniers mois pour le public étant donnée la trajectoire de leur rémunération.
Prise en compte des années d’études.
Concernant la pénibilité prise en compte des situations réelles de travail et reconnaissance de toutes les formes de pénibilité par grands corps de métier.
Taux de remplacement minimum de 75%. Dans tous les cas, pas de pension inférieure au SMIC CGT (2000 €) quel que soit le régime de retraite.
Cela inclut également les agriculteurs et pose la question de la juste rémunération de leur travail.

Financer nos propositions

Le projet que nous portons a bien évidemment des implications financières. La redistribution est l’élément central de notre système par répartition.
Pour le financer, nous avons un éventail de propositions claires et chiffrées. C’est notre travail, et donc la cotisation qui doit financer la sécurité sociale.

Augmenter les recettes de la sécurité sociale pour financer nos propositions

7 leviers principaux :

        1. Hausse des salaires: nécessaire mais insuffisante
        2. Créations d’emploi: l’enjeu majeur
        3. En finir avec les exonérations de cotisations
        4. Mettre à contribution les revenus du capital
        5. Elargir l’assiette des revenus soumis à cotisations
        6. Augmenter les taux de cotisation retraites
        7. La Sécurité sociale est en excédent
La question des augmentations de salaires

L’augmentation des salaires est indispensable. Concernant le financement des retraites, elle permet des cotisations supplémentaires à court terme, mais se traduit plus tard par des pensions supplémentaires à payer. Cela ne permet donc pas d’équilibrer le système à l’avenir.
Une hausse des salaires de 5% dans le privé induirait 9 milliards d’€ de cotisations supplémentaires pour la branche retraites.
Une hausse du point d’indice dans le service public de 5% induirait 1,25 milliard d’€ de cotisations retraites. Si le point d’indice avait suivi l’inflation depuis 2010 cela ferait 5 milliards d’euros de cotisations supplémentaires dans les conditions actuelles.

Une vraie politique de l’emploi

Une augmentation de l’emploi induit mécaniquement une augmentation des cotisations retraites. On estime à environ 1,7 millions le nombre d’emplois qui pourraient être créés avec le passage aux 32 h dans le privé, soit 13,6 Mds€ de cotisations retraites supplémentaires.

100 000 emplois dans le secteur privés = 800 millions d’€ de cotisations retraites.
100 000 emplois dans la fonction publique territoriale = 1,2 milliards d’€ de cotisations retraites.
100 000 emplois dans la fonction publique hospitalière = 1,5 milliards d’€ de cotisations retraites.

Les besoins en embauche sont estimées à 400 000 emplois soit 6 milliards d’euros de cotisations supplémentaires.
Les temps partiels imposés par l’employeur privent les caisses de retraites d’ 1 5 milliards d’€.
Un abaissement de l’âge de départ en retraite à 60 ans correspond 10 milliards d’€ d’économies pour l’assurance chômage et l’État.

En finir avec exonérations de cotisations sociales

En 2023, l’ensemble des exonérations de cotisations va s’élever à 84 milliards d’€. La plupart sont compensées à la Sécurité sociale par l’État, c’est donc ce dernier qui subit le manque à gagner.
Pour les seules exonérations de cotisations retraites, on est à 18,5 milliards d’€ donc 2,5 milliards non compensées, c’est à dire qui pénalisent directement le système de retraites.
Si on revient sur les exonérations de cotisations, c’est l’État qui va voir ses recettes gonfler Ce surplus de recettes peut aussi être fléché vers le système des retraites, moyennant quelques précautions pour ne pas étatiser le système et conserver un financement par cotisation.

Mettre les revenus du capital à contribution

En 2021, les dividendes nets étaient de 50 milliards d’euros. Avec une cotisation à 28% comme le taux de cotisations retraites sur les salaires, ce sont 14 milliards d’euros de recettes supplémentaires. C’est un chiffre minoré car la comptabilisation des dividendes pose problème du fait de l’opacité des montages financiers. La mise à contribution des revenus du capital reste un palliatif, notamment en cas de crise comme le Covid Le véritable enjeu est d’agir en amont en augmentant la part des salaires et réduisant celle du capital et donc ses revenus. L’ensemble des propositions évoquées précédemment (hausse des salaires, de l’emploi et fin des exonérations de cotisations) sont des mesures majeures pour mettre le capital à contribution en amont des dividendes.

Élargir l’assiette des revenus soumis à cotisations

Augmenter l’assiette des revenus soumis à cotisations salariés et employeurs (intéressement, participation, épargne salariale, épargne retraite) : 3 milliards d’€ de cotisations retraites supplémentaires et 3 milliards d’€ de cotisations pour les autres branches, que l’on pourrait affecter aux retraites. Aujourd’hui, les employeurs privilégient ces modes de rémunération pour ne pas s’engager sur le salaire de base et pour profiter des cotisations réduites !
1 milliard d’€ supplémentaire grâce au déplafonnement des cotisations pour les salaires au dessus de 27500 € par mois (8 plafonds de la sécurité sociale).

Augmenter les taux de cotisations

A court terme, un déficit de 12 milliards d’€ peut être résorbé tout simplement avec une augmentation du taux de cotisations de 0,8 point.
Pour un Smic, ça représente 7 € par mois de cotisations salariales et 7 € de cotisation patronales (si partage à 50/50).
Pour un SMIC CGT à 2000 € bruts, cela représente 8.25 € par mois de cotisations salariales et 8.25 € par mois de cotisations patronales (si partage à 50/50).
Pour un salaire à 2500 € bruts, ça représente 10 € par mois de cotisations salariales et 10 € de cotisation patronales (si partage à 50/50).
A moyen terme, augmenter le taux de cotisation retraites de 2 points (tout en augmentant les salaires) correspond une augmentation de 30 milliards d’€ des cotisations.

Sécurité sociale: 13 milliards d’excédents en 2023

La CADES* aura remboursé la « dette sociale » en 2033.
Elle aurait du s’éteindre en 2024 avant un transfert de dette de 136 milliards d’euros liés à la crise Covid.
Cela représente près de 20 milliards d’euros de surplus par an.
Ainsi la sécurité sociale ne sera pas en déficit de 7 Mds€ en 2023 mais en excédent de 13 milliards d’euros.
Même avec 12 milliards de déficit sur les retraites 2030 la Sécu prise dans son ensemble serait en excédent.
Si on tient compte des différentes mesures proposées (augmentation de salaires, augmentation de l’emploi) cela générerait des milliards d’euros d’excédents. supplémentaires puisque les dépenses des autres branches de la Sécu ne dépendent pas du niveau des recettes.

*(Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale, créée en 1996 et dont nous avons contesté la mise en place elle perçoit la CRDS et une partie de la CSG).

Des propositions réalistes

Au total, nos propositions rapporteraient une somme de l’ordre de 100 milliards d’€ par an pour la Sécurité Sociale; de quoi financer le système de retraites que l’on revendique.
Un retour au partage de la valeur ajoutée de 1982 (part du travail de 73,5% contre 64,8% aujourd’hui) représenterait aujourd’hui un transfert du capital au travail de 112 milliards d’€. Nos propositions sont donc largement finançables.

Conclusion

L’opposition entre ce que nous portons et ce que le gouvernement prévoit est claire.
Le gouvernement veut faire des pensions et de l’âge de départ des variables d’ajustement pour financer des baisses d’impôts pour le capital.
Nous voulons ajuster les ressources pour améliorer en profondeur notre système de retraites solidaire actuel.

Deux projets de société qui s’opposent

Celui du gouvernement, budgétairement inique et qui ouvre la voie à la capitalisation et au renforcement des inégalités

Celui de la CGT : finançable, crédible, et résolument tourné vers la cotisation et la répartition pour améliorer et renforcer le système actuel

Du fait des attaques multiples des gouvernements successifs, le stock d’épargne retraite a augmenté de 300 milliards entre 2008 et 2018. C’est sans compter les dizaines de milliards sur les produits d’assurance vie en vue de la retraite. C’est le résultat de la perte de confiance organisée dans notre système et la subvention de l’épargne retraite par l’Etat. Notre projet n’augmente pas la somme des efforts mais les socialise pour que vive le principe de solidarité propre à notre modèle social. Nous mènerons cette bataille pour la sécurité sociale et contre les marchés financiers jusqu’au retrait du projet.

Par ailleurs

Que prévoit le projet de loi portant réforme des retraites qui s’appliquera à partir du 1er septembre 2023 ? Vie publique.fr, 24 janvier 2023

Rapport annuel du COR septembre 2022 – Evolutions et perspectives des retraites en France. Conseil d’orientation des retraites, 15 septembre 2022

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